Dans les yeux de Théo Gosselin

Portrait

Théo, 22 ans, des allures de voyageur bohème nous raconte avec simplicité comment d’un simple passe-temps la photo est devenue le moteur de sa vie.

LES DÉBUTS

Théo commence à s’intéresser à l’image en filmant ses premières vidéos avec sa bande de copains. Inscrit au lycée en section audiovisuelle, il orbite autour de la culture skate, de la musique punk, pense aux belles filles et de plus en plus à la photo, plus accessible et immédiate que le cinéma.

Se promenant dans les friches industrielles, il y découvre un univers inexploité de décors que sa bande au « charisme fou » et lui-même vont s’approprier petit à petit. « Avec le temps, je me suis perfectionné en continuant à faire la même chose mais avec une touche plus artistique. Cela me permettait de créer des souvenirs, tout simplement.»

Bac en poche il intègre sur concours les Arts Déco d’Amiens en Picardie. Un changement radical qui lui ouvre les portes d’un nouveau monde et d’inédites perspectives de rencontres. Venant de toute la France, ses camarades l’initient au voyage, une passion qui ne le quittera pas.

« J’ai commencé à voyager et à rencontrer plein de monde. Au Havre, il y avait ce port aux alentours oubliés, peu fréquentés, où le temps avait fait son office de destruction, une vraie curiosité. A Amiens, le paysage est tout autre : c’est un paysage du Nord aux briques rouges évoquant l’Angleterre, peut-être les pays nordiques. Ça donne l’illusion que ce n’est pas forcément français, que l’on est en train de voyager sans vraiment voyager. »

LE TEMPS DU VOYAGE

A l’été 2012, Théo Gosselin organise un road trip aux Etats-Unis pour un projet intitulé « Precious Gift ». « Je suis parti avec 3 amis et 3 Nikon D800 pour un voyage de 3 mois aux Etats-Unis. Sur place nous avons loué un mini-van et sommes parti en direction de l’Ouest ». Les réseaux sociaux, sur lesquels Théo a été découvert grâce à son blog et sa page FB, les ont aidés à rencontrer du monde en chemin.

[NDLR] Pour l’occasion, un film est proposé au festival du film Nikon : Je Suis Sur La Route (réalisation Lucas Hauchard).

« Tout au long du trajet, des personnes nous contactaient pour nous rencontrer ou nous héberger. Humainement, c’était un voyage incroyable : des jeunes, des vieux, des squatteurs, des universitaires, des hippies… ». Continuateurs du voyage beatnick à la Jack Kerouac, nos voyageurs photographient et filment tout ce qu’ils voient pour un long-métrage actuellement en préparation : « Goodbye Horses ». « Nous avons filmé un mois puis photographié deux mois sur la côte ouest. Au total cela représente tout de même 22 000 km de routes parcourues ! »

Ses photos, Théo nous explique qu’il les doit aux personnes qu’il rencontre, aux moments qu’il vit. Tout le monde peut prendre les mêmes photos mais ces instants sont les siens. Il crée autour de lui le théâtre de ce qu’il capture, à la manière d’un anthropologue de la jeunesse. Pas de mise en scène, pas de préparatifs comme pourrait le faire un Ryan McGinley, uniquement des moments opportunément enregistrés comme des instantanés de vie. A l’instar de Larry Clarke, une de ses inspirations, il témoigne de son cercle proche, rentre parfois dans le cadre, accepte volontiers le hasard des rencontres et s’interdit l’auto-censure.

Autosave-File vom d-lab2/3 der AgfaPhoto GmbH

On retrouve dans les photos de Théo un élément récurrent : l’utilisation du contre-jour. « Le plus grand drame dans ma vie c’est de ne pas me lever assez tôt pour voir le lever du soleil. J’adore ces lumières magnifiques, l’extase que peut procurer le simple fait d’être assis devant le soleil. Mon combat c’est de rendre le soleil aussi beau que celui que l’on voit avec nos yeux. »

Un concentré d’énergie, une déferlante d’émotions, l’irrévérence et la poésie de l’éphémère. Théo capte tout cela avec son style, celui d’un reporter permanent qui s’intéresse à tout et toujours entouré de ses fidèles amis. C’est la notion de partage qui lui paraît être la clé de voûte de tout son travail : « mon envie c’est de raconter des histoires, de rencontrer, de partager les photos, les expériences. »

« J’ai une chance énorme de pouvoir faire ce que je veux, j’essaye de le partager et de faire comprendre qu’en se battant on peut arriver à ses fins. Les gens me disent merci ; ça me donne encore plus envie de voyager, ça me motive. »

LA TECHNIQUE

C’est un peu par hasard que Théo à commencé la photographie et un peu par hasard aussi qu’il a commencé avec un appareil photo Nikon hérité de son oncle.

« Mon appareil préféré est le Nikon D700, super costaud, avec un rendu que j’adore. Je viens aussi d’acquérir le Nikon D800 mais je n’en ai pas encore fait le tour. Il est exceptionnel pour filmer comme j’ai pu m’en apercevoir pendant mon dernier voyage aux Etats-Unis. On a l’impression d’être plongé dans un film dès le playback sur l’écran de contrôle ! La possibilité de faire tous les réglages à la volée et la qualité de l’image m’impressionnent vraiment. »

Pour ce qui est des optiques, le choix de Théo est relativement simple, trois focales fixes grand angles : le 24mm f/2.8, le 35mm f/2 et le 50mm f/1.4. Il utilise l’ouverture maximale de ses objectifs la plupart du temps. « Mon préféré est l’indémodable 35mm f/2, je ne pourrais pas m’en passer ».

En post-traitement: une désaturation légère, des contrastes poussés et la netteté légèrement augmentée pour ajouter du relief à l’image.

« Aujourd’hui, j’utilise aussi énormément le Nikon F2 de 1971, un appareil qu’utilisait déjà mon père et sur lequel on peut mettre toutes les optiques que j’utilise avec le D700 ou le D800. » La photo argentique est une nouvelle étape pour Théo. Appartenant à la génération numérique, il apprécie la réflexion supplémentaire qu’il est nécessaire d’avoir lorsque l’on utilise une pellicule comme support pour ses photos.

LES PROJETS

Théo travaille ou a déjà travaillé pour plusieurs marques dans la mode, la grande consommation ou le luxe. Pour lui, hors de question de se plier à toutes les exigences de ses commanditaires, il est primordial de garder l’esprit de ses photos. Lors d’un shoot pour une marque de mode sur un toit de Paris, il demande à ce que la dizaine d’assistants quittent le plateaux, qu’on éteigne les lumières de studio pour pouvoir travailler en lumière naturelle et que l’on remplace le Hasselblad de location par un Nikon. Les modèles qu’ils photographient ne sont pas des mannequins mais ses amis.

« J’en profite pour mettre à contribution mes amis, c’est un cercle vertueux car cela nous permet de passer un bon moment et de gagner de l’argent pour repartir en voyage ! Toutes les photos que je publie sur mon blog sont des photos de ma vie, de mes potes, de mes copines et finalement de mes rencontres. Des marques peuvent  m’acheter des photos déjà faites mais lorsqu’elles ont été prises il n’y avait pas d’intention commerciale. »

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Pour l’instant, Théo se voit faire de la photographie toute sa vie. Un livre de 96 pages en édition limitée à 400 exemplaires est en préparation pour l’été prochain et son long-métrage « Goodbye Horses » est actuellement en cours de montage. Il sera principalement diffusé sur Internet et Théo promet des projections en salles indépendantes dans plusieurs villes de France. Il prépare également un prochain voyage, un périple autour de l’amour avec son ami Lucas en Ecosse et un tour d’Europe « parce qu’il n’y a pas besoin d’aller en Arizona pour voir des paysages hallucinants.» Encore une fois, les choses se feront en toute simplicité et avec un minimum de superflu : un vélo, un appareil photo et de quoi dormir.

« Mes photos plaisent parce qu’elles donnent une impression de liberté, un retour à la nature,  peut-être aussi parce qu’elle montre une jeunesse fantasmée. La photographie permet de s’imaginer plein de choses et je laisse la possibilité de tout s’imaginer en regardant mes photos. »

« C’est peut-être un peu utopique mais je pense modestement qu’il est possible de faire pareil que moi à toutes les échelles : inutile d’aller aux Etats-Unis ou en Australie, il suffit de s’entourer des bonnes personnes, de faire à fond ce que l’on a envie de faire, de créer des moments, d’inventer et de ne jamais cesser d’être curieux. »

Autosave-File vom d-lab2/3 der AgfaPhoto GmbH

Théo Gosselin

Théo, 22 ans, des allures de voyageur bohème nous raconte avec simplicité comment d’un simple passe-temps la photo est devenu le moteur de sa vie.

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