Depuis la création du Nikon Music Festival, Nikon a décidé de mettre à l’honneur les talents qui allient photographie et musique dans leur travail sur l’image. Rencontre avec Guillaume Kayacan, jeune photographe belge, qui revendique le « Less is more », le fait de cultiver la simplicité et nous offre pourtant des clichés au style indéniable.
Qu’est-ce qui vous a amené à la photographie ?
Vers mes 16 ans j’étais dans une école dédiée aux Arts, Saint-Luc, à Bruxelles. C’était une année où les élèves avaient l’opportunité de « toucher à tout » pour voir ce qui les attirait. A la fin de l’année, nous devions présenter un projet documenté de photographies devant un jury.
Au même moment j’ai eu les premiers contacts avec mon père qui vivait en Turquie, et j’ai été confronté pour la première fois à mes origines, à mon héritage. Je suis donc parti à Istanbul, à sa rencontre et il m’a offert un petit reflex numérique. C’est comme cela que tout a commencé.
Et la suite… ?
A mon retour, j’ai appris l’ABC de la photographie avec un de mes meilleurs amis, Pierre-Loïc Limbourg, qui a su me faire me poser les bonnes questions et m’a poussé à m’impliquer plus sérieusement. Je lui dois énormément.
Puis j’ai rencontré Adrien Ehrhardt avec qui j’ai appris la photo « à la dure ». Nous échangions de nouvelles images en essayant d’aller toujours plus loin. Nous avons assimilé beaucoup de techniques très, très vite en shootant ensemble ou en passant de longues nuits blanches à dénicher des astuces et autres techniques d’éclairage ou de retouches sur des forums russes traduits via Google Translate. Chaque jour nous apprenions quelque chose de nouveau. C’était super excitant. J’en garde de très bons souvenirs.
A l’été 2007, j’ai eu l’occasion de faire des images pour Pendulum, un groupe qui tournait beaucoup à ce moment-là. Ils étaient très contents du résultat et moi j’avais adoré faire ça, la photo devenait une évidence. Je me suis lancé en me fixant un horizon de deux ans pour voir où cela pourrait me mener. A partir de ce moment-là, cela n’a jamais arrêté.
Vers l’automne 2010 j’ai été approché par Carole Congos de l’agence Kaptive, basée à Paris. Elle m’a beaucoup aidé et a toujours cru en moi. Dans les bons comme mauvais moments. Je lui en serai toujours reconnaissant. Et depuis fin 2014 je m’implique dans un studio photo bruxellois avec pour projet d’y développer un studio d’enregistrement musical sur place.
Quelle est votre approche de l’image ?
Je me réfère à cette idée du « less is more ». Annie Leibovitz a toujours avancé que si un portrait ne fonctionnait pas avec une seule source de lumière, il ne fonctionnerait pas avec cinq ou six. Mon travail est assez brut, je shoote rapidement. Mais je fais mes « devoirs » avant bien entendu : je me renseigne, me documente…
Quand je photographie quelqu’un, si le planning et le contexte le permettent, j’essaye de prendre le temps de discuter, d’échanger des anecdotes et de montrer quelques images. C’est seulement après que la prise de vue démarre, et qu’elle devient un peu la suite de la conversation sans être une session portrait très formelle.
Je ne joue pas avec des effets ou accessoires à la mode. J’ai envie que mes images puissent être toujours regardées d’ici quelques années sans que l’on se dise « OK, cela fait très 2010 ou 2015 » à cause du type de retouches, des colorimétries, etc. Je n’ai pas envie de faire des images dont le spectateur peut se lasser.
Pourquoi avoir fait le choix de vous spécialiser dans le portrait ?
L’interaction, le relationnel fait tout. Je ne pense pas être capable de photographier une maison par exemple. Par contre, placez une personne devant ladite maison et là… Le domaine de la photographie est tellement large. Prenez dix photographes, ils feront dix choses totalement différentes. Prenez dix portraitistes, ils feront dix images totalement différentes aussi. Les possibilités sont infinies !
On note une importance de la photographie d’artistes musiciens ? Avez-vous une affinité particulière avec cet univers ?
J’ai photographié des artistes dès que j’ai commencé à m’investir dans la photographie. De fil en aiguille j’ai été présenté à différentes personnes dans plusieurs scènes musicales. J’ai beaucoup travaillé avec la scène drum and bass ainsi que grime en Angleterre. Récemment je me suis plus concentré sur la scène hip hop belge.
J’ai eu de la chance de pouvoir travailler très majoritairement avec des artistes dont j’appréciais le travail. C’est plus que stimulant !
Y a-t-il d’autres thèmes qui vous sont chers ?
Le reportage. La photo qui marque, qui dévoile, qui dénonce, qui interpelle. Je n’en ai jamais fait mais j’apprécie vraiment ce genre d’images. C’est très important. Et cela ne peut pas être bradé ou dévalorisé.
Avez-vous des « maîtres » ou des photographes dont vous appréciez tout particulièrement le travail ? Qui vous inspirent ?
Annie Leibovitz, Norman Jean Roy, Rankin, Nadav Kander, Anton Corbijn, Gregory Crewdson pour les plus établis. Le livre « At Work » d’Annie Leibovitz m’a très fortement influencé. Il y a clairement eu un avant et un après. Je me replonge dedans de temps à autre.
Pour la nouvelle vague, j’ai beaucoup échangé avec Collin Hughes et Paulo Dourado. Nous partagions des images, des essais, des techniques. J’ai été bluffé par le temps et l’énergie que Leturk place dans ses œuvres. C’est incroyable, il fait tout de A à Z. Des premiers croquis à la création des décors jusqu’à la direction.
J’apprécie aussi le travail de Bagrad Badalian, dont les deux parents sont peintres et qui se sert de la photographie comme d’un support. Et enfin Ruben Brulat que j’ai rencontré à Istanbul alors qu’il était sur le point de partir en Asie.
Comment avez-vous connu Nikon ? Pourquoi travailler avec cette marque plutôt qu’une autre ?
Le premier Nikon que j’ai touché était un D70. Nous nous amusions à shooter avec des flashes cobras déportés. Nikon a toujours été réputé pour sa qualité d’image optimale ainsi que ses autofocus très précis. Pas de temps mort.
Je me rappelle la première fois où j’ai importé les images dans Capture One après avoir shooté avec un D600 et des flashes Alienbees : c’était tellement vivant, pas du tout plat, ni fade.
Quels boitiers et objectifs utilisez-vous ? Et pour quel type de photos ?
Côté boitier, la technologie est très mature désormais. C’est plus côté objectif que je fais attention. J’adore le 35mm. Cela permet de faire des portraits tout en ramenant l’ambiance et le contexte du cadre dans l’image. Chose qui est beaucoup plus difficile à réaliser avec un 50mm ou un 85mm. Si je ne devais garder qu’un seul objectif, ce serait un 35mm. Je me sens parfaitement à l’aise avec ce dernier et cela me permettra de couvrir 95% de ce que j’ai devant les yeux.